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Le règne de la grâce dans l’élection

«Oh ! si Dieu voulait parler, s'il ouvrait les lèvres pour te répondre, et s'il te révélait les secrets de sa sagesse, de son immense sagesse, tu verrais alors qu'il ne te traite pas selon ton iniquité. Prétends-tu sonder les pensées de Dieu, parvenir à la connaissance parfaite du Tout-Puissant ? Elle est aussi haute que les cieux : que feras-tu ? Plus profonde que le séjour des morts : que sauras-tu ? La mesure en est plus longue que la terre, elle est plus large que la mer... L'homme, au contraire, a l'intelligence d'un fou, il est né comme le petit d'un âne sauvage» (Job 11:5-12).

C'est pourquoi il intente un procès à la vérité de l'élection, comme s'il s'agissait d'un simple système de partialité et de favoritisme arbitraires. Ce petit homme mortel annonce que, s’il existe une telle chose que l'incapacité totale chez l'homme, d’une part, et une élection souveraine en Dieu, de l’autre, alors la faute de sa perdition ne repose pas à la porte de l'homme. L'apostasie et la mort complète de l'homme dans le péché (de sorte qu’il ne peut se sauver lui-même) et l'entière suprématie de Dieu (de sorte qu'il sauve qui il veut) sont deux doctrines particulièrement repoussantes pour l'orgueil de l'être humain. Elles sont toutefois bibliques.

Pourquoi un des brigands, en croix avec le Seigneur, fut-il sauvé, alors que l'autre demeura dans sa perdition ? «Oui, Père, je te loue de ce que tu l'as voulu ainsi» (Matthieu 11:26). Dieu n'a jamais été sous l'obligation de sauver celui qui le fut. Dieu avait la puissance de sauver l'autre s’il l’avait voulu. Par ailleurs, ni l'un ni l'autre ne pouvait se sauver soi-même. D'où vient la différence de destinée ? De la grâce souveraine de Dieu !

Pourquoi Paul fut-il sauvé, alors que Judas alla à la perdition ? Le premier méritait-il le salut, alors que l’autre ne valait que l'enfer ? Non, ni l'un ni l'autre ne méritait d'être sauvé. Était-ce alors parce que l'un était un objet plus approprié que l'autre pour l’exercice de la grâce de Dieu ? Non, ni l'un ni l'autre n'avait davantage de droit au salut. Peut-on dire alors que cela venait du fait que Paul se tourna vers Christ, alors que Judas le rejeta ? La vraie question est de savoir pourquoi Paul se tourna vers Christ. N'est- ce pas parce que Christ le choisit, comme le Seigneur le dit à Ananias (Actes 9:15) ?

Comment se fait-il que la Judée devint un pays de lumière, alors que l'Égypte demeura dans les ténèbres ? D’où vient la différence, de l'homme ou de Dieu ? Ce dernier faisait-il preuve d'injustice en laissant l'Égypte dans l'ombre de la mort, alors que la lumière se levait sur Israël ? Qu'est-ce qu'Israël avait fait pour mériter un tel privilège ?

Pourquoi, dans l'Histoire, voit-on des pays inondés de lumière de l’Évangile, alors que d'autres restent plongés dans les ténèbres de l’ignorance ? Qui a fait la différence ? Qui envoya l'Évangile à certaines nations et pas à d'autres ? Dieu est-il juste quand il laisse un continent entier entre les mains de Satan mais se plaît en même temps de délivrer de ce terrible joug une minuscule île au sein de l'océan ?

Personne n'a jamais mérité le salut. Aucun homme n’est plus propre à le recevoir qu’un autre. Dieu n’a jamais été sous l’obligation de sauver quiconque. II aurait pu sauver tous les hommes s’il l’avait voulu, mais il n’en sauve manifestement que certains. Est-il injuste d'agir ainsi alors qu'il peut délivrer tout le monde ? On objecte en disant : «Ceux qui sont perdus le sont parce qu'ils rejettent Christ». Mais tous ne le rejettent-ils pas dès le début ? D'où vient que l'incrédulité de certains disparaît ? Est-ce parce qu’ils exercent leur propre volonté ou parce que Dieu exerce sa puissance en eux ? Évidemment, il s'agit du second cas. Dieu n'aurait-il pas pu exercer sa puissance en tous, et empêcher que le moindre homme ne rejette le Sauveur et finisse dans la perdition ? Pourtant, il ne le fit pas. Pourquoi ? Parce qu'il l'a voulu ainsi.

Dieu est-il coupable d'injustice s'il se contente de sauver seulement certains des hommes, alors que tous sont également sujets à la perdition ? Vous répondez non, mais y aurait-il alors de l'injustice dans le fait qu'il détermine à l'avance de sauver une partie de l'espèce humaine seulement et de laisser le reste dans sa perdition ? Aucun des élus ne pourrait accomplir son propre salut. Dieu est-il donc injuste, dans sa sagesse infinie, de décider de les sauver ? Ou bien, est-il injuste de ne pas déterminer de sauver tous les hommes ? S'il abandonnait tous les hommes à leur perdition, il ne ferait pas preuve de la moindre injustice. Comment donc se peut-il qu'il y ait de l'injustice dans le fait qu’il décide d'en sauver certains ?

Aucune grâce n'est possible là où il n'y a pas de souveraineté. Refusez à Dieu son droit de choisir qui il veut, et vous le dépouillez de son droit de sauver qui il veut. Ôtez-lui le droit de sauver qui il veut, et vous rejetez le fait que le salut vient par grâce. Si le salut s'articule sur le moindre mérite ou la plus petite parcelle de valeur chez l'homme (visible ou non), la grâce disparaît aussitôt.

Certains soulèvent aujourd'hui une controverse en ce qui concerne la volonté de Dieu. Est-elle la puissance régulatrice dans l'univers et la cause qui procure le salut des âmes, ou bien est-ce la volonté de l'homme ? On remet en question la suprématie de la volonté divine sur les individus et sur les événements en particulier. On fait tourner les choses sur l'axe de la volonté de l'homme, et non plus sur celle de Dieu. Selon ces gens, la volonté de l'homme détermine désormais qui entrera dans la gloire céleste. Ce n'est plus la plume de Dieu, mais celle de l'homme, qui inscrit les noms des élus dans le livre de vie de l'Agneau ! Un zèle abondant se déploie en faveur de la liberté de la volonté de l'homme, et il ne semble pas rester beaucoup de zèle pour promouvoir la liberté de la volonté de Dieu. Les hommes prétendent aujourd’hui qu’il est injuste et tyrannique de la part de Dieu de contrôler leur volonté. Ils ne voient pourtant rien d'injuste ni d'orgueilleux, oui, même de satanique, à vouloir enchaîner et diriger la volonté du Dieu souverain. Il semble que l'homme sera incapable de gratifier sa propre volonté insensée tant que Dieu ne consentira pas à renoncer à la sienne !

Nous avons ici un grand pas dans la marche en direction de l'athéisme. Ce sont là les préparations accomplies en ces derniers jours par la ruse de l'usurpateur qui cherche à détrôner l'Éternel Dieu.

On peut traiter mes propos de spéculations et les condamner comme des paroles sans profit. À la loi et au témoignage ! La Bible regorge de spéculations de cet ordre. Le livre inspiré de Dieu présente l'homme comme un vermisseau, misérable et impuissant. L'Écriture annonce un salut qui provient entièrement du Seigneur, du début jusqu'à la fin. La volonté de Dieu sert de loi pour l'univers, et non celle de l'homme. Si nous voulons maintenir l'Évangile et défendre l'honneur de l'Éternel, saisissons ces vérités avec une poigne ferme. En effet, s'il n'existe aucun Être tel que l'Éternel, suprême dans sa prédétermination, alors l'univers ne tardera pas à plonger dans le chaos. Il est même étonnant qu'il ne l'ait déjà fait ! De même, s'il n'existe pas une chose telle que l'amour libre et souverain qui choisit pour le salut, alors tout serviteur de Christ peut se taire, et tous les pécheurs peuvent se vautrer dans un désespoir absolu.

Horatius Bonar

(«Les Échos de la Vérité», 4e trimestre 1995)

 



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